Nuisances sonores

La réglementation relative au bruit est dispersée essentiellement entre le Code de l’Environnement au titre de la prévention des nuisances acoustiques et visuelles, reprenant les principales dispositions de la « loi bruit » du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, et le Code de la Santé Publique pour ce qui a trait à la lutte contre « les bruits de voisinage », dont le décret n° 2006-1099 du 31 août 2006 a fixé les modalités d’application.

Demeurent aussi les dispositions que peuvent prendre le Maire et le Préfet en fonction des pouvoirs qui leurs sont conférés.

Tapage nocturne 

C’est sans nul doute, l’infraction la plus connue. Elle figure dans le code pénal en son article R 623-2, réprimant « les bruits ou tapages injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité d’autrui », communément appelé « tapage nocturne ». Par le mot « nocturne », il faut considérer la période allant du coucher du soleil au lever du jour, mais contrairement aux idées reçues, les propos grossiers ou méprisants prononcés fortement, même de jour peuvent être sanctionnés.

La cessation du tapage s’obtient en contactant les forces de l’ordre (officiers ou agents de police judiciaire – gendarmerie ou commissariat et depuis septembre 2007, sous certaines conditions les agents de police municipale ainsi que les gardes champêtres): elles demanderont à l’auteur de cesser immédiatement et dresseront un procès-verbal. Ce PV est une preuve suffisante pour que la victime des troubles poursuive le ou les auteurs devant les juridictions pénales, lesquels encourent une peine d’amende des contraventions de 3ème classe (soit au maximum 450 Euros).

Les autres bruits de voisinage  :

« Aucun bruit particulier, ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme dans un lieu public ou privé, qu’une personne en soit elle-même à l’origine ou que ce soit par l’intermédiaire d’une personne, d’une chose dont elle a la garde ou d’un animal placé sous sa responsabilité » tels sont les termes de l’article R 1334-31 du Code de la Santé Publique, qui ne peuvent souffrir aucune ambiguïté.

Il n’y aucune distinction entre le jour ou la nuit, l’existence d’un seul des critères cités suffit à constituer le trouble.

Par ailleurs, si le bruit constitue une gêne, la « victime » pourra tenter de saisir les tribunaux civils afin que ces derniers apprécient l’existence ou non d’un trouble anormal de voisinage (tout dépendra de sa durée, répétition et de son intensité), dont l’action sera étudiée ci-après.

Ainsi, certains sont des bruits liés aux comportements désinvoltes et/ou à un manque d’égard pour le voisinage sans pour autant violer une règle particulière : à titre d’exemples, puisque tout est affaire de cas, citons :

  • l’aboiement incessant de plusieurs chiens (une distinction doit s’opérer entre le milieu urbain ou rural),
  • des occupants d’un appartement martelant le plancher, marchant avec des talons, faisant de la musique à un niveau puissant, tout particulièrement la nuit,
  • le remplacement de la moquette par des matériaux qui diminuent l’isolation phonique alors que le règlement de copropriété stipulait que le niveau d’isolation phonique d’origine devait être maintenu, et ce, même si les nouveaux revêtements phoniques respectent les valeurs phoniques réglementaires, 
     

Ces bruits peuvent être constatés par tout moyen (attestation de témoins, constat d’huissier), sans qu’il soit nécessaire de procéder à des mesures acoustiques (une constatation auditive suffit, l’agent assermenté se basant sur la notion « d’inconvénient normal de voisinage ») et sur le plan pénal, l’auteur peut être sanctionné (par une peine d’amende prévue pour les contraventions de 3ème classe – soit 450 euros selon l’article R 1337-7 du Code de la Santé Publique).

D’autres bruits proviennent d’activités professionnelles, culturelles, sportives ou de loisirs organisées de manière habituelle ou soumises à autorisation : l’infraction sera constatée si un certain niveau sonore est dépassé Il sera donc nécessaire d’obtenir une mesure acoustique au regard des normes existantes pour le jour et la nuit (qui peut être faite par la police) : on parle d’émergence globale et/ou spectrale, dont l’auteur peut être sanctionné pénalement par la peine d’amende prévue pour les contraventions de 5ème classe – soit 1 500 euros (article R 1337-6 du Code de la Santé Publique).

Dans tous ces cas de « bruit », le décret prévoit également la possibilité de confisquer la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou la chose qui en est le produit, comme de sanctionner le fait de faciliter sciemment par aide ou assistance ces infractions.

Mais quelles solutions pour y remédier ?

Les solutions amiables

Elle sont largement préconisées en s’adressant directement à l’auteur du trouble :

  1. L'informer verbalement, ou par lettre simple pour lui proposer une rencontre pour en discuter, mais courtoisement de la gêne qu’il occasionne
  2. Si son comportement ne change pas, il est souhaitable de lui faire une lettre recommandée avec avis de réception, pour l’informer de la situation en lui rappelant la réglementation qui s’applique dans ce cas, et exprimant votre intention d’entamer une procédure administrative ou judiciaire s’il le faut.
  3. Faire appel à un tiers peut également s’avérer utile : le syndic par exemple (lorsque le trouble trouve sa source dans un non respect du règlement de copropriété), ou le bailleur, en cas de location, la mairie (qui renseignera sur l’existence ou non d’un arrêté spécifique sur par exemple les horaires de bricolage et/ou jardinage, sachant que le maire peut diligenter des agents municipaux assermentés pour venir constater les troubles, et dans la limite de ses attributions, peut prendre un arrêté si plusieurs personnes sont gênées par le même bruit), un conciliateur de justice (son assistance est gratuite), une médiation judiciaire, le médiateur de la République en cas de conflit avec l’administration.

Si les démarches amiables n’ont rien donné, une possibilité sera offerte de saisir les Tribunaux.

Les solutions judiciaires

Tout d’abord, il convient de préciser que par construction jurisprudentielle, les juges ont édicté un principe en vertu duquel « nul ne doit causer à autrui un trouble de voisinage », permettant ainsi à une personne d’obtenir réparation des inconvénients anormaux du voisinage à condition d’apporter la preuve de l’existence d’un dommage anormal, les juges civils fondant souvent leurs décisions sur les rapports d’experts acousticiens.

En effet, le trouble est une gêne anormale par son ampleur et sa durée, mais le trouble peut être caractérisé alors qu’il n’y a aucune faute, seulement un comportement excessif.

Les juges tranchent les situations au cas par cas.

  1. Le Tribunal d’Instance : dès lors que l’intérêt du litige ne dépasse pas 10.000 Euros, et en l’absence d’infraction pénale, celui-ci est compétent. Le Tribunal sera celui du lieu du litige ou du lieu du domicile de l’auteur du trouble. Les parties peuvent se faire assister ou représenter.
    Avant tout Jugement, le Juge d’instance tentera de concilier les parties : en cas d’échec, il rendra une décision, laquelle pourra faire l’objet des voies de recours habituelles : appel et cassation.
  2. Le Tribunal Administratif : le saisir lorsque le maire ou le préfet n’ont pas pris de mesures  pour amoindrir ou faire cesser les troubles, ou au contraire ont pris des arrêtés créant ou aggravant les troubles. En tout état de cause, la saisine du Tribunal administratif interviendra après une mise en demeure adressée à l’administration et restée infructueuse (refus ou silence pendant plus de deux mois).
  3. La juridiction pénale : Tribunal de Police
    Une victime peut saisir la juridiction pénale toutes les fois où le trouble constitue une infraction pénale  ou une personne s’estimant victime, porte plainte soit en se rendant à la gendarmerie ou au commissariat, soit en adressant un courrier au Procureur de la République, en mentionnant précisément les faits reprochés, joignant le cas échéant les noms et adresses des témoins.
    Le procureur peut proposer la « médiation pénale » pour tenter de concilier les parties, grâce à l’intervention d’un médiateur : le résultat de sa médiation sera transmis au Procureur qui décidera ou non de la poursuite de l’affaire.
    La victime se constituera partie civile pour obtenir des dommages et intérêts de la juridiction pénale, et devra impérativement être présente ou se faire représenter à l’audience.
    Aux termes d’une audience publique, orale et contradictoire, le juge dirigeant les débats prononcera un Jugement susceptible de recours.
  4. Le Juge de Proximité : 
    Présents pour décharger les tribunaux d’instance, ils bénéficient d’une double compétence en matière civile et pénale, traitant les litiges d’un montant inférieur ou égal à 4.000 euros et peuvent statuer sur les litiges liés au tapage nocturne, ainsi que les bruits de voisinage (au sens des bruits de comportements dits aussi « domestiques » dont la sanction relève de l’article R 1337-7 du Code de la Santé Publique précité).

Leur saisine s’effectue simplement par une demande écrite, et la procédure est la même que devant le tribunal d’instance : la « victime »  demande une conciliation et la condamnation de l’auteur du trouble au versement de dommages et intérêts.

Le Juge saisi d’une demande, une fois le trouble constaté, dispose d’un large panel de sanctions. Ces sanctions dépendent toutefois de la demande formulée par le plaignant : en général, la sanction des troubles anormaux de voisinage consiste (en sus du prononcé éventuel d’une amende, en fonction des compétences qui lui sont dévolues) :

  • en premier lieu en l’allocation de dommages et intérêts, réparant tant les conséquences physiques et/ou psychologiques que la nuisance a eue sur la vie quotidienne, que le préjudice financier (perte de loyers due à l’impossibilité de louer l’immeuble à cause de locataires bruyants)
  • puis, les tribunaux mettent en œuvre d’autres types de sanctions qui s’apparentent à la réparation en nature : ils peuvent ordonner la cessation de l’exploitation si tel est le seul moyen de mettre un terme aux nuisances, mais plus souvent préfèrent condamner l’auteur des troubles à l’exécution de travaux s’ils sont de nature à supprimer la gêne occasionnée.

Enfin, deux dernières astuces :

  • ne pas hésiter à réclamer l’affichage ou la publication du jugement – aux frais du condamné - : une certaine publicité peut « contraindre » l’auteur des troubles à se comporter différemment et, solliciter une condamnation sous astreinte (l’astreinte étant une somme d’argent due, par heure, jour ou semaine de retard tant que le trouble n’a pas cessé).

En conclusion, les nuisances sonores diurnes ou nocturnes constituent un panel très vaste, et nous ne pouvons que vous « orienter » sur les démarches à effectuer, sachant que tout est affaire de cas.

Compte tenu des délais procéduraux (les décisions étant susceptibles de recours), la solution amiable ou « les vertus du dialogue » demeure la meilleure pour entretenir de bons rapports avec son voisinage.